LE REGARD DES BETES
Dans la Chine ancienne, l’empereur Qin (son nom se prononce Tchin, et c’est de lui que vient le mot : Chine) avait édicté une loi ordonnant l’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour chaque homme… et pour tous les grands animaux : c'est-à-dire les chevaux, les vaches, les bœufs, les moutons ! On pourra s’étonner qu’un empereur aussi puissant et terrible ait eu la volonté de doter ainsi d’un alphabet hommes et bêtes. On pourra prétendre que, dans l’esprit de Qin, sujets humains et animaux avaient le même rang. On ferait peut-être mieux de s’interroger : si, en ces temps lointains, un personnage aussi sanguinaire que Qin pouvait encore voir en ces bêtes une intelligence, une sensibilité, proches de la nôtre, qu’avons-nous donc perdu en chemin aujourd’hui ? En ce siècle où les paysans ne sont plus que producteurs de viande ovine, bovine, chevaline ?
Sous le regard patient et doux des bêtes, c’est peut-être notre nature même d’homme qui est désormais en danger.
(texte de Patrice Favaro)